Jeux d'échecs électroniques
 

Si les programmes de première génération comme Chess challenger 1 et 3 ou encore comme Chess champion étaient vraiment très faibles, Boris change, heureusement, la donne et apporte son lot d'améliorations.

Ainsi, Boris, c'est son nom, est véritablement le premier jeu d'échecs électronique à présenter un intérêt pour le joueur, car si son niveau reste très modeste, de nombreuses erreurs de programmation sont supprimées; enfin, un jeu d'échecs peut se faire l'éloge de (presque) jouer correctement... les règles! Ce qui compte fait est la moindre des choses pour une machine qui vaut tout de même à sa sortie aux US en 1977 et en France en 1978 respectivement 299,99$ et 2100F.

Mais il est vrai que les concepteurs Dan & Kathy Spraklen n'ont pas lésinés sur le produit car outre un coffret en noyer très esthétique, il dispose d'un afficheur Led à 8 digits. Celui-ci permet quelques bonnes idées, comme la possibilité d'afficher l'échiquier en cours (par rangée et avec des caractères -très- spéciaux) ou bien d'observer les coups calculés par Boris pendant sa réflexion.

Il peut aussi commenter les coups... enfin ça se résume plutôt en quelques phrases succinctes, comme "Illegal move", "Good move" ou bien encore "Is this a trap?", qui n'apportent en fait pas grand chose puisque tirées au hasard (à part un brin d'humour...). A la place il aurait été mille fois préférables que les concepteurs utilisent la mémoire non pas pour des commentaires mais pour stocker une bibliothèque d'ouvertures car Boris en est dépourvue!
Dans ce cas, elle aurait pu contenir à peu près une dizaine de variantes de 5-6 coups, ce qui n'aurait pas été un luxe! et cela aurait fait plus sérieux (voir parties ci-dessous)...

Rapidement les caractéristiques techniques sont: microprocesseur 3850 plus connu sous le nom de F8, vitesse d'horloge de 2,1 MHz, mémoire Ram de 64 octets, et Cpu travaillant sur des mots de 8 bits. Il comporte deux Rom, sans doute de 1 Ko chacune (aucun référence). A noter qu'il y a un emplacement de libre pour une autre mémoire morte, peut-être qu'il avait été envisagé de sortir une version améliorée comportant par exemple une bibliothèque (ou de nouveaux commentaires, non je taquine là!).

Mais attention, l'ordinateur n'est pas du tout exempte de défauts... en effet s'il possède un niveau de jeu très médiocre (voir ci-dessous) et une absence d'ouvertures, il souffre aussi de défauts d'ergonomie, le plus pénible étant qu'il ne possède pas de niveau à proprement parlé; à la place on fixe un temps de réflexion et il ne jouera qu'après ce temps de réflexion écoulé...même s'il y a au bout du compte un gain forcé!
Celui-ci est réglable de 0 à 100 heures mais l'ordi chauffe tellement qu'à mon avis l'utiliser plus d'une dizaine d'heures est techniquement risqué: la façade métallique est déjà chaude au bout d'une heure de jeu! Un conseil donc: ne fermez pas le couvercle lorsque l'ordi est allumé!

De plus, comme il se fait à l'époque, on saisit le coup avec un clavier qui est ici très dur; il faut donc appuyer assez fort pour être sûr que le coup soit enregistré, alors parfois si l'on ne relâche pas suffisamment vite, la touche est prise en compte deux fois de suite.
Enfin on ne peut pas revenir en arrière, on doit si l'on fait une erreur éditer la position de l'échiquier.

Un truc bizarre, c'est qu'il peut commencer une partie en jouant un coup noir... encore une erreur de logique!

A noter que Boris n'est utilisable que sur secteur (d'ailleurs pas très pratique puisque le câble est soudé à l'intérieur de la boite) et il était vendu avec un échiquier pliable et ses pièces.

Etudions maintenant par la pratique le niveau de jeu.

Match Boris VS Mini Sensory  

Le match du jour oppose donc Boris au Mini Sensory de Fidelity Electronics. Ces deux machines électroniques possèdent respectivement, selon la liste SSDF, 1267 et 1300 points Elo, et sont, même si Boris est sortie trois ans plus tôt, d'un niveau très proche.
Cette confrontation est censée montrer à quel point leur force de jeu est encore faible.

Testons les d'abord sur un simple mat en deux coups (Diag. 0).
Boris trouve la clef du problème (1. Cf7 Rf6 2. Th6 mat) en 77 secondes. Mini Sensory met 74 secondes, autant dire que les deux résultats viennent confirmer leur proche niveau et que le délai est raisonnable. On peut déduire le nombre de positions analysées par seconde: on trouve à peu près 30 pos/sec.
Disons tout de suite qu'un mat en trois coups est pratiquement introuvable. D'ailleurs leurs notices ne font référence qu'à des mats en deux coups.

Voici maintenant les résultats du match:

Mini Sensory réglé niveau 1 soit 5-22 sec de réflexion en moyenne
Boris réglé à 13 sec de réflexion fixe.

Mini Sensory-Boris= 1-0 (25 coups)

Première partie très mal engagée pour Mini Sensory car au 5ème coup (Diag.1) au lieu de déplacer son cavalier en prise, il préfère mettre le roi adverse en échec. En fait ce coup reflète le gros problème des petites machines:
MS ne voit pas le coup 5... c6 tout simplement parce que il n'a pas eu le temps de l'envisager et qu'il n'est donc pas descendu assez loin dans l'arbre d'analyse -c'est ce qu'on appelle l'effet d'horizon-.
Si l'on réfléchit bien c'est "normal" car pour trouver le bon coup il aurait du calculer les 25 réponses noires possibles puis, alors, une partie des 35 réponses blanches possibles. Ce qui fait un total de 900 positions.
A raison de 30 positions par seconde, il lui aurait fallu 30 sec; un programme gérant l'algorithme alpha-bêta aurait trouvé le bon coup dans le temps imparti, mais Boris et MS sont limités par leurs méthodes de sélection des coups -qui est la Force brute-.

Mais MS va finalement l'emporter sur une encore plus grosse faute de Boris (Diag. 2), ici Boris vient de jouer 16... FxTf1, il n'a pas vu la fourchette Cxe6+!!! Incroyable.

Boris-Mini Sensory= 1-0
(30 coups)


Boris
joue comme premier coup... e3, on voit là le problème de ne pas disposer de bibliothèque d'ouvertures, en un coup il vient contredire toute la théorie de Nimzowitsch!

MS offre bêtement un fou au 13ème coup (Diag. 3) en jouant 13... Fxa2 puis au 14ème il offre un pion et enfin, au 15ème coup, un cavalier... Autant dire que Boris n'en demandait pas temps!
MS ne reverra jamais ni son fou, ni son pion et ni son cavalier!

Au bout de deux parties: Egalité.

Mini Sensory réglé niveau 2 soit 10-35 sec de réflexion en moyenne
Boris réglé à 35 sec de réflexion fixe

Mini Sensory-Boris= 1-0 (24 coups)


La partie la plus serrée. Les deux adversaires se neutralisent jusqu'à ce que Boris joue (Diag. 4): 22... Fe3??? S'ensuit: 23. Dd7+ Rf8 24. Df7 mat. Sans commentaire.

Boris-Mini Sensory= 0-1
(16 coups)

Voici un partie qui aurait du durer 8 coups et qui va en durer le double.
Là encore Boris débute par e3.
Le jeu de MS est intéressant dans ce début.
Il laisse un cavalier en prise afin de se concentrer sur l'aile roi des blancs. Il se retrouve vite avec un gros avantage et Boris est complètement dépassé par les évènements.

Mais au 8ème coup (Diag. 5) il se produit l'inconcevable: MS n'a plus qu'à jouer 8... Df2 mat... au lieu de cela il joue 8... Ff2+??? Allez comprendre! En tout je n'ai pas d'explication, peut être que les programmeurs le trouvaient tellement fort qu'il lui ont interdit de mater un adversaire avant le 10ème coup (je suis méchant...)!
Au final il gagnera quand même la partie.

Donc vainqueur Mini Sensory sur le score de 3 à 1. Bon le score ne reflète pas grand chose sur 4 parties et surtout contre un unique adversaire...
C'est pourquoi un grand tournoi sera organisé, plus tard, avec un temps de réflexion d'une minute à peu près.

A noter d'autres erreurs que j'ai relevé:
Boris "aime" bien prendre une pièce avec son roi et ainsi supprimer les possibilités de roques...
Il joue la prise en passant mais n'accepte pas que l'adversaire la joue!
Il peut jouer consécutivement trois à quatre fois la même pièces (ex: Ta1-a2 puis Ta2-a1...) sans que ça le gêne.


Conclusion  
Même si Boris n'était pas une révolution, il gèrait convenablement les règles et pouvait avec des temps de réflexion de quelques minutes donner du fil à retordre au débutant.
Même s'il perd ici contre MS, n'oublions pas que celui-ci est sortie quand même trois ans après.

Mais ne rêvons pas, de nos jours, il aura plus sa place... dans un musée!
 
 
Boris chess computer
 
Chess Challenger 7

Cet ordinateur date de 1979 et est le deuxième Chess Challenger de la marque Fidelity Electronics à avoir été commercialisé en France.

Comme pour tous les Chess Challenger le chiffre 7 indique qu'il comprend sept niveaux de jeu. Son Elo selon la liste SSDF est de 1300 points. Il tourne à 4 Mhz et comprend une bibliothèque de 80 positions(!)


 
Chess champion Super system III
Cet ensemble de la marque Novag dispose d'un ordinateur principal auquel peuvent se connecter des périphériques comme une imprimante ou bien un échiquier LCD.
Il date de 1979.
 
SC2
Ordinateur de 1984 avec de belles pièces en bois et très solide puisque l'échiquier est en plastique moulé.

 
Kasparov Travel champion 2100
Jeu d'échecs électronique portable de 1996, il dispose de nombreuses options plus ou moins intéressantes comme le son de la pendule, le choix du niveau d'agressivité dans l'ouverture... Ses niveaux de jeu sont très diversifiés (blitz, partie 2heures 40 coups, profondeur 6 coups...) et il est très fort (2000 points Elo).

Il comprend également une vaste bibliothèque d'ouvertures de 35000 positions (selon le constructeur, car j'en ai compté pour ma part seulement 12000) avec 750 variantes et il arrive qu'au 14-15ème coups, il soit encore en train de piocher les coups dans sa mémoire (la variante la plus longue stockée étant le gambit Marshall avec 16 coups ou 32 demi-coups).

Il gère de plus l'inversion des coups et reconnaît donc une position dont l'ordre des coups joué n'est pas celui mémorisé. A noter que des versions salon et non portable existent aux nom respectifs de President et GK2100.

Conclusion: un très bon jeu électronique qui donnera du fil à retordre à tout joueur de club.
 
 

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